La femme dans l'Église et les fantômes du passé

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Je n’oublierai jamais ma première rencontre avec mon pasteur. Notre famille fréquentait l’Église depuis deux ans, lorsqu’une réunion avec un autre responsable m’a projetée sur sa route. Ses premiers mots ont été: "Jen Wilkin. Tu te cachais!"

Avec un sourire généreux, il m’a prise chaleureusement dans ses bras, puis a commencé à me poser des questions pour mieux me connaître. Il m’écoutait attentivement. Il me regardait dans les yeux. Il reformulait ce que je disais. J’étais complètement déstabilisée. Je n’ai aucun souvenir des livres qui se trouvaient sur son bureau, des tableaux qui étaient accrochés au mur, mais je suis ressortie de son bureau ce jour-là avec cette conviction: cette pièce n’était pas hantée.

Il avait raison: je me cachais. Après plusieurs années de ministère à temps « partiel » au sein d’une autre communauté, mon mari Jeff et moi étions épuisés. Nous n’étions pas pressés de nous faire connaître auprès des responsables de notre nouvelle Église. Mais en tant que femme ayant eu responsabilités dans l’Église, j’avais d’autres craintes. Une femme qui remplit un ministère ne sait jamais si le lieu est « hanté ».

Si vous êtes un homme, responsable dans l’Église, je vous invite à vous imaginer une histoire de fantômes. Je ne sous-entends pas du tout que vous ayez un problème avec les femmes, et je sais que vous avez de bonnes raisons d’être prudents avec elles dans l’exercice de votre ministère. J’ai aussi le désir que vous restiez sages, mais je ne veux pas que vous soyez hantés.

Trois spectres féminins hantent beaucoup d’Églises, et j’aimerais que vous sachiez les reconnaître, afin de pouvoir les bannir de la vôtre.

Ils planent dans nos réunions d’équipe, là où sont prises les décisions. Ils survolent les salles de cours, où l’on enseigne la théologie. Ils s’attardent dans nos salles de prière, où les plus faibles d’entre nous partagent leur souffrance. Ils sèment la peur dans le cœur des hommes et des femmes. Pire encore, ils suscitent la crainte dans les interactions qu’ils peuvent avoir entre eux. Leur but est de priver les hommes et les femmes de leurs capacités à servir ensemble.

En tant qu’hommes, vous n’êtes pas toujours conscients que ces fantômes rôdent, mais la plupart des femmes qui œuvrent avec vous dans le ministère le sont généralement. Presque chaque semaine, mes lectrices me font part de ces histoires de fantômes par courriels.

Voici qui sont ces trois spectres: la Rivale, la Tentatrice et la Jeune.

La Rivale

Ce fantôme prend place quand les femmes sont perçues comme des voleuses d’autorité. Les hommes qui ont grandi avec l’idée que les femmes cherchent à s’approprier ce qui leur a été donné sont particulièrement sensibles à la peur que ce fantôme peut susciter. Si c’est votre cas, voici quelques comportements qui vous sont peut-être familiers, en particulier avec une femme de caractère:

  • Vous trouvez que ses idées ou ses opinions peuvent représenter une menace, même quand elles sont exprimées avec des mots bien choisis.
  • Vous imaginez que son mari doit probablement être un homme faible (ou bien qu’elle est célibataire à cause de sa forte personnalité).
  • Vous avez peur qu’elle vous prenne le bras si vous lui tendez la main.
  • Vous évitez de l’inviter à certaines rencontres, de peur qu’une forte personnalité féminine vienne troubler l’ambiance « masculine ».
  • Vous imaginez qu’elle veut vous contrôler, sur la base de signaux qui vous alertent, comme son niveau d’éducation, la longueur de ses cheveux ou sa carrière professionnelle.
  • Vos conversations ressemblent plus à une joute verbale qu’à un dialogue respectueux. Vous hésitez à poser des questions, et vous interprétez les siennes comme des attaques sournoises, au lieu de les voir comme sincères.
  • Vous vous demandez si le fait qu’elle soit à l’aise avec des hommes ne cache pas un mépris pour l’attribution des rôles.

La Tentatrice

Ce fantôme s’installe lorsque la volonté d’éviter la tentation, ou d’être irréprochable, se transforme en la peur que les femmes ne deviennent des prédatrices sexuelles. Parfois, ce fantôme hante les lieux parce qu’un responsable a chuté auparavant dans ce domaine, soit dans l’Église, soit dans la vie chrétienne au sens large. Si ce fantôme vous suit, voici les comportements que vous adoptez généralement lorsque vous interagissez avec une femme, particulièrement quand elle est attirante:

  • Vous faites des efforts surdimensionnés pour être sûr que votre communication ne soit ni trop émotionnelle ni trop empathique, de crainte que l’on ne prenne cela pour de la séduction.
  • Vous évitez de la regarder dans les yeux.
  • Vous vous demandez si elle a choisi sa tenue vestimentaire pour attirer votre attention.
  • Vous essayez de comprendre ce que sous-entendent ses paroles ou ses gestes.
  • Vous vous faites accompagner à chaque rencontre par un collègue ou un assistant, même s’il n’y a pas de risque avéré.
  • Vous refusez tout contact physique, même (et surtout?) si la personne est en crise.
  • Vous vous restreignez volontairement dans vos interactions, par peur de paraître trop familier.
  • Vous vous sentez obligé de prononcer ou d’écrire des « phrases de sécurité » comme: « Salue bien ton mari: » ou « Tous mes vœux pour ton ministère et ta famille! »
  • Vous mettez systématiquement quelqu’un en copie de toute votre correspondance (son conjoint, un collègue…).
  • Vous vous demandez secrètement si sa proximité avec les hommes ne serait pas le signe qu’elle est une femme facile.

La Jeune

Ce troisième fantôme se complait dans un lieu où les femmes sont considérées comme émotionnellement ou intellectuellement plus faibles que les hommes. Si c’est votre fantôme, voici comment vous pourriez vous comporter lorsque vous interagissez avec une femme, surtout si elle est jeune:

  • Vous lui parlez avec un vocabulaire plus simple que celui que vous emploieriez avec un homme du même âge.
  • Le ton de voix devient « pastoral » quand vous lui parlez.
  • Lorsque vous lui répondez, vous avez tendance à réagir à ses émotions plutôt qu’à ses idées.
  • Vous envisagez la rencontre essentiellement à sens unique: vous avez beaucoup à lui apprendre, et peu à recevoir. Vous prenez très peu de notes, voire pas du tout.
  • Vous ne la prenez pas au sérieux quand elle manifeste un désaccord, car « elle n’a probablement pas une vue d’ensemble sur la situation ».
  • Vous vous forcez à sourire et affichez un air intéressé pendant vos interactions avec elle.
  • Vous la renvoyez à des ressources moins poussées que celles que vous recommanderiez à un homme.

Ces trois fantômes ne viennent pas hanter seulement les hommes. Les femmes aussi peuvent se laisser troubler dans leurs choix, de mots, d’intonation, vestimentaire, de comportement.

Quand c’est la crainte qui dicte nos interactions, cela perturbe notre dialogue d’égal à égal: les deux sexes en viennent à jouer un rôle.

Dans une Église libérée de tout fantôme, là où l’amour bannit la crainte, les femmes sont considérées (et se considèrent elles-mêmes) comme des alliées plutôt que des rivales. Comme des sœurs plutôt que des tentatrices. Comme des collaboratrices plutôt que des enfants.

Merci à Cédric Jung pour la traduction de cet article, traduit avec autorisation. Copyright © 2023 The Gospel Coalition, INC. Vous pouvez lire l’article complet en anglais ici.

Jen Wilkin

Jen Wilkin est auteure et enseignante biblique à Dallas, au Texas. Elle a organisé et dirigé des études pour les femmes à la maison, à l'Église et hors Église. Sa priorité est de faire connaître la Bible. Elle aime voir des gens qui ont une vision claire du discipulat, qui s'engagent à suivre le Christ, qui comprennent les raisons pour lesquelles ils croient ce qu'ils croient, en s'appuyant sur la Parole de Dieu. Vous pouvez la suivre sur JenWilkin.net.

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