Un armistice avec Dieu

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La fête de l’armistice: l’occasion idéale pour méditer quelques minutes sur le grand armistice avec Dieu.

[En 2018] nous avions célébré les cent ans de la signature de l’armistice, qui avait mis fin à la Première Guerre mondiale le 11 novembre 1918. Le président français Emmanuel Macron et la chancelière allemande Angela Merkel s’étaient symboliquement retrouvés dans une reproduction du fameux wagon de l’armistice. C’est dans ce wagon qu’on avait officialisé la fin des combats et la capitulation de l’Allemagne. Quelques heures après la signature, des cloches et des clairons avaient résonné dans toute la France. C’était la fin d’une guerre qui aura laissé plus de huit millions de morts et six millions d’invalides ou de mutilés.

Dans la Bible, il est aussi question de guerre et de paix. De guerre et de paix entre peuples, certes. Mais la Bible présente en outre le thème de la paix sous un angle qui lui est unique. Il est question de “paix avec Dieu”, c’est-à-dire de paix entre l’homme et Dieu.

Un armistice est une décision commune de suspendre les hostilités. Qu’est-ce que cela peut bien signifier pour la relation entre l’être humain et Dieu?

Lisons Romains 5.1-2, 6-11, et demandons-nous ce que ce texte nous révèle sur la paix avec Dieu.

1 Ainsi donc, déclarés justes sur la base de la foi, nous avons la paix avec Dieu par l’intermédiaire de notre Seigneur Jésus-Christ; 2 c’est aussi par son intermédiaire que nous avons accès par la foi à cette grâce, dans laquelle nous tenons ferme, et nous plaçons notre fierté dans l’espérance de prendre part à la gloire de Dieu. (…)

6 En effet, alors que nous étions encore sans force, Christ est mort pour des pécheurs au moment fixé. 7 À peine mourrait-on pour un juste; peut-être accepterait-on de mourir pour quelqu’un de bien. 8 Mais voici comment Dieu prouve son amour envers nous: alors que nous étions encore des pécheurs, Christ est mort pour nous. 9 Puisque nous sommes maintenant considérés comme justes grâce à son sang, nous serons à bien plus forte raison sauvés par lui de la colère de Dieu. 10 En effet, si nous avons été réconciliés avec Dieu grâce à la mort de son Fils lorsque nous étions ses ennemis, nous serons à bien plus forte raison sauvés par sa vie maintenant que nous sommes réconciliés. 11 Bien plus, nous plaçons notre fierté en Dieu par notre Seigneur Jésus-Christ, par qui maintenant nous avons reçu la réconciliation. (Rm 5.1-2, 6-11)

En m’appuyant sur ce texte, j’aimerais mettre en lumière quatre déclarations qu’il faut absolument signer pour obtenir la paix avec Dieu. Ce sont quatre déclarations étonnantes qui ne sont pas tellement au diapason de la pensée actuelle. Elles sont pourtant au cœur même du message central de la Bible.

1. « Je reconnais être en conflit avec Dieu. »

Appuyons davantage sur cette première déclaration, dans la mesure où les trois autres en découleront.

Notre texte biblique s’adresse à des chrétiens qui ont trouvé la paix avec Dieu. Verset 1: « Nous avons la paix avec Dieu par l’intermédiaire de notre Seigneur Jésus-Christ. »

Mais la situation qui a précédé cette paix était bien différente. Selon le verset 10: « Nous avons été réconciliés avec Dieu grâce à la mort de son Fils lorsque nous étions ses ennemis. »

Paul affirme qu’avant leur conversion à Jésus-Christ, ses lecteurs romains étaient tous les ennemis de Dieu. C’est un diagnostic qui apparaît régulièrement dans la Bible, sous diverses formes. Sans Christ, nous sommes tous les ennemis de Dieu.

Dans quel type de conflit sommes-nous engagés? La Bible nous apprend que l’hostilité que nous entretenons envers Dieu est surtout une quête d’indépendance.

En réalité, il y a deux façons de mener un conflit d’indépendance contre Dieu.

La première façon de s’opposer à Dieu, c’est en menant une vie immorale.

Attention aux clichés ici. Je ne parle pas forcément de débauche extrême et totale. Être immoral, c’est tout simplement rejeter les principes de vie que Dieu expose dans sa Parole. Ces principes s’appliquent à tous les domaines de notre vie. La Bible nous explique:

  • comment vivre en société
  • comment nous comporter vis-à-vis des autorités
  • comment vivre les relations humaines
  • comment régler nos conflits
  • comment gérer notre corps
  • comment vivre la sexualité
  • comment voir les biens matériels et l’argent
  • comment garder les bonnes priorités
  • comment élever nos enfants
  • comment nous comporter envers nos parents
  • comment concevoir le travail
  • et ainsi de suite

Dans la Bible, Dieu s’exprime sur tous les domaines de la vie. Il nous présente des principes moraux qu’il nous demande d’observer. Mener une vie immorale, c’est tout simplement rejeter ces principes, dans un ou plusieurs domaines. C’est par exemple refuser de pardonner à une personne qui nous a offensé. C’est se laisser ronger par le matérialisme. C’est faire preuve de malhonnêteté quand on remplit sa déclaration de revenus.

Le problème quand on choisit cette première approche, c’est qu’on néglige le fait que Dieu veut notre bonheur et non notre malheur. Les principes qu’il nous donne sont les plus susceptibles de nous rendre heureux. Pourquoi? Parce que Dieu est notre Créateur. C’est lui qui nous a conçus. Il sait mieux que quiconque ce dont nous avons besoin pour bien fonctionner et pour bien vivre. Les principes moraux de Dieu, c’est en quelque sorte le manuel de l’utilisateur. C’est même le guide du bonheur.

Un parallèle peut être fait avec les règles de protection de l’environnement. Les scientifiques ont un rôle essentiel à jouer dans la préservation de la planète parce qu’il nous expliquent la façon dont fonctionne la terre. Ils nous disent comment en prendre soin et nous mettent en gardent contre les mauvaises habitudes qui pourraient la détruire. Ensuite viennent des lois nationales et internationales (pas toujours malheureusement!), qui prennent en compte leurs travaux et nous poussent à mieux vivre pour notre propre bien et pour celui de nos enfants et de nos petits-enfants.

Dieu est l’expert en « recherches sur l’être humain » puisqu’il est le concepteur de l’homme. Ses lois ont pour but de nous rendre heureux, de nous permettre de nous épanouir et d’empêcher notre destruction personnelle et sociale.

Pour résumer l’immoralité (cette première façon de s’opposer à Dieu), on pourrait dire ceci: être immoral, c’est chercher à tenir Dieu à l’écart. C’est se débarrasser de ses règles et se libérer de toute « contrainte ». Une telle quête d’indépendance se retourne souvent contre l’être humain.

La deuxième façon de s’opposer à Dieu, c’est en inventant notre propre morale.

Cette approche est extrêmement populaire aujourd’hui. Quand on invente sa propre morale:

  • on essaie de devenir quelqu’un de bien sans l’aide de Dieu, par ses propres forces;
  • on prend seulement ce qui fait son affaire parmi les règles de Dieu.

Ces deux attitudes sont liées. En effet, si je prends seulement ce qui fait mon affaire, qui correspond habituellement à ce que je peux assez facilement accomplir, alors je n’ai pas besoin de l’aide de Dieu pour vivre moralement. Je peux y arriver tout seul.

Si la première approche, l’immoralité, nous pousse à tenir Dieu à l’écart, la seconde, la « moralité à la carte », nous amène à devenir notre propre Dieu.

Non seulement c’est moi seul qui établis mes règles de vie (plutôt que mon Créateur), mais en plus, c’est moi seul qui décide si j’ai suffisamment observé ces règles. On aboutit ainsi à une espèce de « cercle vicieux de la moralité tout humaine »! Il s’agit en tout cas d’une moralité circulaire qui tourne autour de moi.

Le comble de l’indépendance, c’est la souveraineté du moi. Il n’y a aucun regard extérieur sur ma vie. Je prends toutes les décisions morales et je m’auto-évalue. Or, en général, nos auto-évaluations ont tendance à être assez généreuses, du genre: « Je ne suis peut-être pas Mère Teresa, mais je suis quelqu’un de très bien. »

Chacun d’entre nous doit répondre à la question: « Quelle est ma tendance? L’immoralité ou la moralité sélective? » Nous sommes portés à voir ces deux options comme deux pôles diamétralement opposés. D’un côté, il y a le débauché. De l’autre, l’homme ou la femme de principe. Or dans la Bible, les deux se rejoignent. Ce sont deux formes de conflit avec Dieu, deux types de quête d’indépendance.

2. « Je réalise qu’un Dieu juste ne peut laisser mon attitude impunie. »

Dieu ne peut pas rester neutre face à ma quête d’indépendance, qu’elle soit immorale ou morale.

Il peut paraître surprenant de parler de punition dans un article sur la paix. Pourtant, paix et châtiment sont souvent indissociables après un conflit. Quand on dépose les armes, et souvent pendant plusieurs années, on fait le procès des criminels de guerre. On condamne les individus qui ont enfreint les conventions internationales.

Comment réagirait-on si l’on disait simplement, dans la foulée d’un conflit armé: « Oublions toutes les atrocités perpétrées par les criminels de guerre. Leur dossier est maintenant vierge, il peuvent repartir à zéro. » Personne ne voudrait de la paix à ce prix. Une petite voix intérieure nous dit que lorsqu’il y a conflit, justice doit ensuite être faite. Le processus de paix perd son intégrité si les criminels de guerre ne sont pas punis en proportion de leurs crimes.

Il en va de même dans notre relation avec Dieu. Notre quête d’indépendance, qu’elle ait été menée par une vie immorale ou par une existence morale, doit être justement punie.

En effet, Dieu, notre Créateur, n’apprécie pas notre quête d’indépendance, avec raison. Au verset 9 de notre texte, il est question de la « colère de Dieu ». Les chrétiens de Rome seront sauvés de cette colère, ils seront épargnés:

Puisque nous sommes maintenant considérés comme justes grâce à son sang, nous serons à bien plus forte raison sauvés par lui de la colère de Dieu.

Il ne s’agit pas, comme c’est souvent le cas quand nous nous mettons en colère, d’un déversement incontrôlé de frustration et d’irritation de la part de Dieu. Il s’agit plutôt de l’application finale, après notre vie sur terre, d’un jugement juste qui correspond à la gravité de notre quête d’indépendance et qui reflète l’immense tristesse de Dieu et son dégoût face à notre rébellion.

Ce jugement sera incontestable et irrévocable.

Au chapitre 2 de cette même lettre aux Romains, Paul affirme qu’un jour, “Dieu jugera par Jésus-Christ le comportement secret des hommes” (Rm 2.16). Les hommes immoraux et moraux seront jugés. Les uns pour avoir rejeté Dieu, les autres pour avoir remplacé Dieu.

Personne n’échappera à cette évaluation divine qui sera menée selon des critères extérieurs à nous: les critères parfaits et justes de la Parole de Dieu.

3. « J’accepte l’unique proposition de paix qui intègre l’amour de Dieu et sa justice. »

Si la quête d’indépendance de l’homme est illégitime, qu’est-ce que Dieu propose à la place? Il invite l’être humain à adopter une nouvelle attitude face à lui. Il lui propose d’entrer dans un rapport d’agréable dépendance et de paisible confiance envers Dieu.

Dieu propose de tout faire lui-même pour construire la paix. Il demande à l’homme de la recevoir comme une pure grâce, comme une faveur qui ne se mérite pas. L’être humain n’a qu’à répondre à Dieu: « Merci. »

Comment cela se passe-t-il au juste? Revenons à notre texte. Relisons les versets 6 à 8:

6 En effet, alors que nous étions encore sans force, Christ est mort pour des pécheurs au moment fixé. 7 À peine mourrait-on pour un juste; peut-être accepterait-on de mourir pour quelqu’un de bien. 8 Mais voici comment Dieu prouve son amour envers nous: alors que nous étions encore des pécheurs, Christ est mort pour nous.

Il peut arriver qu’une personne donne sa vie pour une autre. Un parent pour un enfant, un secouriste pour une personne en détresse. Un ancien président français avait déclaré, devant le congrès américain:

Les pères dans mon pays ont amené leurs fils voir les grands cimetières où sous des milliers de croix blanches dorment si loin de chez eux des milliers de jeunes soldats américains qui sont tombés non pas pour défendre leur propre liberté mais la liberté de tous les autres.

Des soldats français ont aussi donné leur vie pour les autres.

Mais Jésus-Christ, le Fils de Dieu, a donné sa vie non pas pour ses alliés, mais pour ses ennemis. Et ça, ça ne se fait jamais. Pourquoi Jésus a-t-il fini sa vie sur une croix? Pour construire la paix entre Dieu et les indépendantistes que nous sommes.

Si Dieu avait dit: « J’oublie votre quête d’indépendance et votre rébellion, et on fait la paix », nous aurions peut-être été tentés de croire qu’il nous aimait. En réalité, il aurait perdu son intégrité et sa crédibilité. Il aurait proclamé une paix injuste.

Pour que Dieu reste à la fois aimant et juste, une seule solution existait. Par amour, il nous a proposé de nous épargner du châtiment que nous méritions, sa colère; par justice, il a non pas éliminé ce châtiment, mais il l’a redirigé vers le seul homme qui ne le méritait pas, Jésus, qui pouvait le supporter pour d’autres.

Jésus est mort sur la croix à notre place. Il a subi la colère de Dieu que nous avons provoquée et que nous méritions. La justice de Dieu a été satisfaite parce que notre rébellion a bel et bien été punie. Et l’amour de Dieu a été démontré, parce que Jésus a accepté d’être condamné à notre place. Sur la croix, il a subi l’hostilité de Dieu pour que nous goûtions à la paix avec Dieu. Il a temporairement perdu la paix avec Dieu pour que nous puissions l’obtenir éternellement. Notre texte affirme que ceux qui acceptent son sacrifice sont « maintenant considérés comme justes grâce à son sang » (verset 9).

C’est ce que l’apôtre Paul appelle ailleurs: « La folie de la croix. » Un message complètement fou, jusqu’au jour où l’on en découvre personnellement toute la profondeur et toute la puissance. Comment jouir de ce que promet ce message? Notre texte nous dit que c’est « par la foi », c’est-à-dire en mettant notre confiance en Jésus-Christ et en acceptant de dépendre de la proposition de paix de Dieu.

4. « Je suis conscient que la paix avec Dieu me fera entrer dans une relation éternelle avec lui. »

Dans notre texte, la paix, c’est beaucoup plus que la fin des hostilités. Dans les versets 10-11, il est question à trois reprises de réconciliation:

10 En effet, si nous avons été réconciliés avec Dieu grâce à la mort de son Fils lorsque nous étions ses ennemis, nous serons à bien plus forte raison sauvés par sa vie maintenant que nous sommes réconciliés. 11 Bien plus, nous plaçons notre fierté en Dieu par notre Seigneur Jésus-Christ, par qui maintenant nous avons reçu la réconciliation.

Faire la paix avec Dieu, c’est beaucoup plus que déposer les armes. Pendant la veillée de Noël 1914, dans les tranchées françaises, écossaises et allemandes, on a accepté de déposer les armes temporairement pour fêter Noël. Mais est-ce que la paix se limite à ne pas se tirer dessus? Ceux qui ont vu le film Joyeux Noël connaissent la réponse. Cette nuit-là, en plein temps de guerre, les soldats ennemis ont fraternisé. Au son de la cornemuse des Écossais se sont mêlés les voix des Allemands et les instruments des Français. On s’est retrouvé en plein champ de bataille pour manger et boire ensemble, pour faire connaissance, et même, pour faire la fête. Pendant quelques heures, on a goûté à la paix.

Faire la paix avec Dieu, c’est plus qu’arrêter de s’opposer à lui. C’est entrer dans un état de bien-être et d’épanouissement en sa présence. C’est apprendre à le connaître, c’est entrer en relation avec lui, c’est jouir de sa bonté et de sa grâce à chaque jour. C’est aussi s’attendre à prendre part un jour, après notre vie sur terre, à sa gloire, c’est-à-dire à la beauté de son éclat majestueux.

C’est ce que Paul écrit dans notre texte:

1 Ainsi donc, déclarés justes sur la base de la foi, nous avons la paix avec Dieu par l’intermédiaire de notre Seigneur Jésus-Christ; 2 c’est aussi par son intermédiaire que nous avons accès par la foi à cette grâce, dans laquelle nous tenons ferme, et nous plaçons notre fierté dans l’espérance de prendre part à la gloire de Dieu.


Encore aujourd’hui, Dieu nous invite à entrer dans son wagon d’armistice. La proposition de paix, il l’a déjà élaborée et mise en action par la mort de son Fils pour chacun d’entre nous. Tout ce qu’il nous reste à faire, c’est de signer.

Le traité comporte quatre déclarations:

  • Je reconnais être en conflit avec Dieu.
  • Je réalise qu’un Dieu juste ne peut laisser mon attitude impunie.
  • J’accepte l’unique proposition de paix qui intègre l’amour de Dieu et sa justice.
  • Je suis conscient que la paix avec Dieu me fera entrer dans une relation éternelle avec lui.

Contrairement à l’autre, le wagon de l’armistice de Dieu n’est pas dans un musée. Il est toujours en fonction et en mouvement. Quand on signe la paix avec Dieu, c’est le début d’un grand voyage et d’une belle aventure qui nous mènera très loin.


Cet article a été rédigé et publié pour la première fois le 12 novembre 2018 à l’occasion des 100 ans de la signature de l’armistice de 1918. Je le republie ce 6 mai 2022 à l’approche de la commémoration de l’armistice du 8 mai 1945, dans le but d’atteindre de nouveaux lecteurs.

Dominique Angers

Doyen de la Faculté de Théologie Évangélique à Montréal (Université Acadia), Dominique Angers y est aussi professeur de Nouveau Testament et de prédication. Docteur en théologie de l’Université de Strasbourg, il s’exprime régulièrement sur son podcast vidéo d’enseignement biblique, “Parle-moi maintenant”. Il est l’auteur du livre La méditation biblique à l’ère du numérique et du Commentaire biblique Parle-moi maintenant par Éphésiens. Son prochain commentaire, Parle-moi maintenant par Marc, paraîtra chez BLF.

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F. Varak